Par RÉJEAN CÔTÉ
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Les lunettes de visée
Les lunettes de visée ou communément appelées « télescopes » équipent presque toutes les armes de chasse de nos jours. Les télescopes d’aujourd’hui sont fiables, robustes et précis, contrairement aux lunettes des premiers jours pas toujours fiables et fragiles.
Pour chasser, l’utilisation des télescopes est beaucoup plus facile que les mires à œilleton ou les mires ouvertes avec hausse et guidon. Ils facilitent le tir pour les chasseurs moins habiles ou avec des problèmes de santé. Par contre, j’ai malheureusement remarqué après de longues années à régler des télescopes pour les chasseurs que près de 85% ne connaissent pas grand-chose de leur système de visée.
Nous allons tenter de démystifier toute cette technologie parce que les lunettes de visée modernes sont des viseurs optiques à la fine pointe de la technologie. Nous allons parler des composantes de votre télescope. On parlera donc de tube, de lentilles, de l’oculaire et de l’objectif, de grossissement, de tourelles pour régler la hausse et la direction, de réticule, de distance focale, de minute d’angle (MOA).
Le tube
Le tube ou la carcasse de votre télescope est la structure métallique qui supporte toutes les autres parties. La carcasse peut être faite de différents matériaux, aluminium, acier, fibre de carbone ou un alliage de ces différents matériaux. Les tubes des télescopes modernes sont remplis de gaz, habituellement de l’azote pour empêcher l’infiltration d’humidité ou de tout autre corps étranger. Chose à considérer, la plupart des tubes sont de 1 pouce (25.4 mm) de diamètre mais certaines compagnies font des tubes de 30 mm (bien que plus rares il existe aussi des tubes de 34 mm et 35 mm) ce qui permet des lentilles plus grandes. Par contre, des montures plus grandes seront nécessaires.
Illustration schématique d’une lunette de visée.
Les lentilles
L’importance des lentilles est primordiale parce que c’est le matériel optique entre votre œil et la cible, leur qualité est fondamentale, c’est ce qui vous donne une image claire et précise de votre cible et ce à n’importe quelle distance. La qualité des lentilles allemandes et suisses est reconnue. Par exemple, la compagnie Zeiss produit des lentilles de très haute qualité pour des instruments d’arpentage et des microscopes. Mais aujourd’hui avec les nouvelles technologies de fabrication beaucoup d’autres compagnies fabriquent des lentilles de très hautes qualités et comme bien d’autres choses, plus vous voulez de haute qualité, plus le prix sera élevé.
Il faut cependant énoncer un fait indiscutable sur les lentilles, comme elles sont faites en verre, même les meilleures produisent de la réflexion, c’est-à-dire qu’une partie de la lumière qui frappe la lentille est réfléchie en dehors du télescope. Pour une image claire et précise, il doit y avoir le moins de réflexion possible. Plus il y a de lumière qui passe jusqu’à l’objectif, plus l’image est claire. Durant les meilleures heures de chasse soit à l’aube le matin et à la brunante le soir c’est là que la quantité de lumière passant dans les lentilles doit être la plus importante. Pour parer à ces réflexions indésirables, les compagnies appliquent des enduits « coating » sur les lentilles. Certains de ces enduits peuvent être très couteux et sont appliqués en couches extrêmement fines de l’ordre du micron (0,0001 mm). Chaque compagnie a ses secrets sur les produits utilisés, le sulfate d’argent ayant déjà fait partie de ces produits. Une fois appliqués, ces enduits permettent un meilleur passage de la lumière et diminuent les réflexions. Plus il y a d’enduit de qualité, meilleure est la captation de lumière et plus claire est l’image.
Réflection sur une lentille sans enduit
Réflection sur une lentille avec enduit
Comment savoir si vos lentilles ont les bons enduits aux bons endroits. La plupart des compagnies indiquent si les lentilles ont ou n’ont pas d’enduit et en quelle quantité. Il y aura des indications comme « coated » qui indique que certaines lentilles ont des enduits, « fully coated » indique que toutes les lentilles ont un enduit et « fully multi coated » indique que toutes les lentilles ont plusieurs couches d’enduits.
La grandeur de la lentille de l’objectif (lentille de devant) est également important, plus la lentille est grande plus il y a de lumière qui pénètre dans le télescope et encore une fois, ce fait est important à l’aube et au crépuscule. C’est pourquoi les lentilles de 50 mm sont très populaires aujourd’hui et avec raison. Certains télescopes et jumelles ont même des lentilles de 56 mm. Mais chaque avantage a souvent un désavantage, une grande lentille fait augmenter le volume et le poids total de la lunette et son prix aussi. À vous de faire le compromis qui vous convient. Le diamètre de l’objectif de votre télescope est le dernier chiffre qui indique la puissance de la lunette, comme « 3 X 9 X 50 ». Les deux premiers chiffres sont le grossissement, 3 à 9 de grossissement et 50 est le diamètre de l’objectif, 50 mm.
La distance focale (eye relief)
La distance focale est la distance, en pouce, entre l’œil et l’oculaire (la lentille où votre œil regarde). Cette distance est importante parce que c’est la distance qui permet de voir le mieux dans votre lunette. Si votre œil est à la bonne distance focale, vous ne verrez pas de cercle noir autour du réticule ce qui arrive souvent aux novices. De plus, si vous êtes trop proche de l’oculaire vous risquez de vous faire des blessures au-dessus de l’œil lors du recul.
Le grossissement
Le grossissement est le nombre de fois que l’image paraît plus proche de la réalité. Un grossissement de 3 X 9 vous indique que la puissance de votre lunette vous permet de grossir l’image de 3 fois plus proche à 9 fois plus proche. Le grossissement semble être une question de goût, mais il est surtout en relation avec le type de chasse et le gibier convoité. Les télescopes de la génération précédente avaient des grossissements fixes souvent 4 X. Aujourd’hui pratiquement tous les télescopes ont des grossissements variables.
Si vous chassez toujours à partir d’une cache fixe, vous pouvez vous permettre des grossissements puissants comme 12, 14 et 16. Par contre, si vous faites de la chasse fine à l’occasion, assurez-vous d’avoir un grossissement léger comme 3 X ou moins. Lors d’un tir rapide vous n’avez pas le temps de chercher votre gibier dans l’oculaire de votre lunette, vous devez le voir immédiatement et au complet en épaulant. Si vous chassez les animaux nuisibles aussi appelés « vermines » de l’anglais « varmint hunting », vous aurez besoin de grossissements puissants, ces gibiers sont petits et souvent tirés de loin, on parle alors de 4 X 24 ou 6 X 24 ou plus.
Les réticules
Le réticule est en fait ce que la plupart des chasseurs appellent « la croix ». Ce surnom vient surement du fait que la plupart des réticules sont faits de deux lignes qui se croisent en leur centre en forme de croix. Mais il existe aussi des réticules avec seulement 3 lignes, une ligne horizontale et une demie ligne verticale en provenance du bas, il y a aussi les points rouges lumineux et les réticules gradués.
L’importance du réticule est trop souvent négligée. Il ne faut pas oublier que ce fameux réticule est la chose qui se situe entre vous et le gibier convoité, il doit être facile à voir et à placer sur la cible. Souvenez-vous que l’orignal et l’ours ont la fourrure noire et au crépuscule si votre réticule est fait de lignes trop fines il sera difficile de l’aligner sur un point fixe. Les lignes fines et graduées sont habituellement faites pour les tireurs à la cible à longue portée. Votre réticule doit contraster avec l’environnement et votre gibier.
Plusieurs fabricants de lunettes de visée ont différents réticules pour leurs différents modèles. Voici quelques différents modèles de réticules existants.
Duplex
Duplex gradué
Compétition
Militaire type 1
Militaire type 2
Le réticule « duplex » est un des plus utilisés par les chasseurs, il contraste bien avec l’environnement et la petite croix centrale permet de pointer facilement un point précis sur la cible.
Il existe des réticules illuminés qui peuvent être pratiques à l’aube et au crépuscule mais l’utilisateur doit bien connaitre ce système parce que le réticule peut devenir très aveuglant s’il est mal réglé ou mal utilisé. On peut même l’utiliser en plein jour mais encore là il faudra compenser la puissance d’illumination avec la lumière ambiante.
Le correcteur de parallaxe
Le concept de parallaxe est difficile à visualiser et même à comprendre. La « parallaxe » est l’angle formé par les axes optiques de deux instruments visant le même objet, exemple l’axe de votre lunette et votre œil. Dans votre lunette de visée, les nombreuses lentilles et l’axe de votre œil peuvent produire à longue portée des images très légèrement désaxées qui peuvent apparaître légèrement floues. Ce phénomène se produit surtout sur des tirs à longue portée avec de très petites cibles comme pour les tireurs de compétition.
Donc, certaines lunettes ont une roulette quelques fois très grosses du coté gauche graduée de 1 à ∞ (l’infini), c’est le correcteur de parallaxe. Pour utiliser ce correcteur, il est préférable de connaître la distance de la cible. Si la cible est de 200 verges on règle le correcteur à 2 à 400 verges on règle à 4 et ainsi de suite. Pour chasser, un correcteur de parallaxe n’est pas vraiment nécessaire.
Les tourelles
Les tourelles sont les « cadrans » situés sur le dessus et sur le côté droit du télescope. Leurs fonctions sont primordiales, elles servent à déplacer le point d’impact lors du réglage du télescope.
La tourelle de hausse (sur le dessus) sert à corriger les tirs de haut en bas ou vice-versa. La tourelle de direction ou d’azimut (à droite) corrige les tirs de droite à gauche ou vice-versa. On entend souvent les chasseurs parler de correction en « clic ». Mais en fait, les corrections se font en « minutes d’angle » en anglais ont dit « minute of angle » ou MOA et chaque « clic » est ¼ de MOA. Le concept de minute d’angle (MOA) est malheureusement la chose la moins comprise.
C’est quoi un minute d’angle? En géométrie balistique, une minute d’angle est l’angle que sous-tend une « corde » de 1 pouce à 100 verges. En fait la vraie distance est 1,05 pouce à 100 vgs mais 5/100 de pouce ne font pas une grosse erreur. Ne pensez pas ici à « corde de bois », ça n’a rien à voir. En géométrie, une corde c’est le trait qui joint les deux lignes d’un angle. Les tourelles des télescopes sont habituellement graduées en quart de MOA donc chaque « clic » déplace le projectile de ¼ de pouce à 100 vgs, ½ pouce à 200 vgs et ainsi de suite.
1 clic
1 clic
Illustration du déplacement du point de visée d’un clic ou ¼ de MOA à 100 et 200 verges.
Dans les tables balistiques des sites internet des compagnies de munitions ont donne les dépressions ou augmentations de hausse à différentes distances en « MOA ». Par exemple, calibre 308 Win, projectile de 150 gr l’arme est réglée à 100 vgs, si vous tirez à 200 vgs ajoutez 1 MOA à votre hausse donc 4 clic vers le haut.
Sur les télescopes utilisés en Europe, on utilise le système métrique donc des milliradians au lieu des minutes d’angle. Donc un milliradian est une corde de 1 cm à 100 mètres. Chaque « clic » déplace le projectile de 1 cm.
Tout ceci semble compliqué à première vue et pour plusieurs ça l’est. Votre lunette de visée est un superbe instrument d’optique complexe à comprendre mais facile à utiliser, il faut en prendre soin. Les lentilles peuvent s’égratigner et il faut toujours garder les couvercles sur ces dernières jusqu’au moment de la chasse.
Si vous débutez et que vous voulez chasser avec un télescope bien « ajusté » voyez donc un spécialiste, quelqu’un qui est habitué à faire ce genre de réglage.
J’espère que cette chronique vous aidera à mieux comprendre votre lunette de visée.
Bonne chasse!