CHRONIQUE

100% CHIEN
DE SANG

CHRONIQUE

100% CHIEN
DE SANG

Par
Suzanne St-Pierre

Un temps d’attente adéquat permet souvent d’éviter les problèmes

Et si on parlait des temps d’attente. D’où ça vient et pourquoi attendre avant de chercher votre gibier? On recommande d’attendre une heure après le tir avant de se diriger vers le gibier et trois heures quand on le relève.

Il faut attendre une heure après le tir, afin de laisser le temps à l’animal de succomber à ses blessures sans le pousser à se déplacer plus loin. Il est important de tenir compte que ce ne sont pas toutes les blessures vitales qui sont mortelles immédiatement (à court terme). Si possible, on continue de l’observer afin de  savoir dans quelle direction il se dirige,  s’il se relève.

Le point le plus important de l’attente est la sécurité. Tout le monde le sait, les animaux sauvages peuvent charger. On n’a qu’à penser aux vidéos sur les réseaux sociaux, de personnes qui s’approchent de bêtes sauvages, surtout en hiver, et qui se font charger et parfois blesser. Ici, on parle de bêtes qui ne sont pas blessées. Imaginez-vous leur réaction lorsqu’ils sont souffrants, épuisés ou agonisants. C’est extrêmement dangereux de s’en approcher à cet instant précis. En effet, il arrive que des conducteurs ou leur chien de sang se fassent blesser par les gibiers traqués. Jusqu’à maintenant, Tracker (chien de sang de l’auteure) et moi en sommes sortis avec de bonnes frousses et montées d’adrénaline à quelques reprises après avoir relevé des gibiers, que ce soit de jour comme de nuit.

C’est l’analyse des indices découverts durant la traque qui permettra au conducteur de chien de sang de déterminer si on doit encore attendre avant de poursuivre les recherches.

Pour ce qui est du délai de trois heures après avoir relevé un gibier, c’est une raison plus complexe qui entremêle des questions d’anatomie, de réflexe biologique et d’instinct de survie.

Pour cela, je dois vous expliquer ce qui se passe lorsqu’un animal blessé essaie de se sauver d’un prédateur. Sa réaction physique : garder toute son énergie pour fuir. C’est-à-dire que le sang qui amène normalement l’oxygène vers les muscles, organes et tissus n’est dirigé que vers les muscles, le cœur et les poumons afin d’assurer sa fuite. La circulation ne se fait donc pas normalement dans le reste du corps, les fonctions de digestions sont mises en pause afin d’assurer un apport suffisant en oxygène et nutriments aux muscles, cœur et poumons. Si la cible est atteinte au niveau du foie ou du système digestif, le sang ne circulant que faiblement à ces organes, il ne s’échappe pas par la blessure et cela retarde la mort.  Lorsque la bête estime être en sécurité, elle se couche et la circulation sanguine reprend son rythme normal, l’hémorragie abdominale peut donc avoir lieu et la mort arrive plus rapidement.

Cela empêche également de repousser l’animal encore plus loin, de perdre sa trace ou de le retrouver dans un endroit éloigné ou difficile d’accès

D’après les observations, trois heures est le délai le plus raisonnable, afin de permettre à l’animal de mourir sans toutefois mettre la qualité de la viande en péril. Dans certains cas, selon l’emplacement du tir, une période d’attente peut se prolonger de plusieurs heures après la première couche, dépendant des indices recueillis sur place. L’avis d’un conducteur de chien de sang d’expérience n’est pas à négliger, lorsque l’on relève un gibier. L’animal peut aussi bien mourir dans l’heure qui suit, succomber 10 heures plus tard, comme il peut aussi survivre à ses blessures, dépendamment de celles-ci. C’est vraiment du cas par cas et selon l’espèce chassée, il y aura également des nuances.

Il est important de noter qu’un gibier qui se couche n’est pas toujours atteint mortellement, mais c’est très souvent le cas. Si la blessure est non-mortelle mais qu’elle nuit au déplacement, exemple : patte, près de la colonne vertébrale, ou même un choc qui occasionne une commotion cérébrale. Le gibier se couchera pendant un certain temps et repartira sans en mourir. Dans tous les cas, l’interprétation des indices de blessures est la clé du succès.

L’auteure Suzanne St-Pierre est conductrice de chien de sang dans la région de Dolbeau au Lac Saint-Jean. Elle a suivi sa formation de l'ACCSQ en 2015 et elle effectue des recherches depuis 2016. Elle prend d’ailleurs toutes ses vacances pour la chasse à l'orignal qui constitue la grande majorité de ses recherches. Sur la photo une recherche fructueuse d’un gros ours noir avec son compagnon canin.
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